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 [Collectivités territoriales – Citoyenneté] Démocratie locale : séparation des pouvoirs dans les collectivités

20 octobre 2015

separation_pouvoir© Hortigüela

Grande oubliée des lois de décentralisation, la démocratie locale est en grande souffrance. Elle a besoin d’une réforme urgente, qui la place en centre de la vie des collectivités. Et si, pour y arriver, on instaurait un vrai système de séparation des pouvoirs, comme il en existe beaucoup en Europe ?

On en a déjà parlé, la décentralisation a apporté beaucoup en termes d’efficacité des politiques publiques, mais elle laisse énormément à désirer en matière de démocratie locale.

Un gouffre démocratique à combler

Principal problème : les exécutifs locaux ne disposent presque d’aucun contre-pouvoir. Les contrôles de légalité, faute de moyens humains et donc d’expertises, se contentent depuis plusieurs années du minimum formel. Les chambres régionales des comptes font, certes, un travail essentiel, mais a posteriori. Et leurs critiques ne débouchent que rarement sur des inconvénients majeurs pour les élus pointés du doigt.

Il faut mettre en place, au niveau local, le même système de séparation des pouvoirs qui existe au niveau national.

Il n’est qu’à voir les rodomontades des maires « tirant leur seule légitimité du seul peuple » quand une CRC vient les chatouiller de trop près, pour mesurer les limites du système. Le fait que des élus notoirement corrompus (suivez mon regard) aient pu suffisamment tout dominer sur leur territoire pour gagner plusieurs élections de suite suffit à mesurer le gouffre démocratique à combler.

Un exécutif local, un législatif local

Que faire, donc, comme disait l’autre ? L’idée générale est de mettre en place, au niveau local, le même système de séparation des pouvoirs qui existe au niveau national dans toute démocratiedigne de ce nom. Pour faire vite, un exécutif qui élabore et propose des politiques et un « législatif » qui contrôle son action et vote le budget. L’Italie, la Belgique, les États-Unis fonctionnent déjà avec ce système : le maire est élu, de son côté, au suffrage universel direct (parfois indirect).

Pour faire vite, un exécutif qui élabore et propose des politiques et un « législatif » qui contrôle son action et vote le budget.

Le conseil municipal est élu, de son côté aussi, à la proportionnelle, ou pas. Deux légitimités populaires doivent travailler ensemble, c’est le principe du check and balance, dont l’idée originelle, ne l’oublions pas, était de limiter l’arbitraire et d’empêcher les abus liés à l’exercice de missions souveraines.

Des moyens pour l’opposition… et pour la majorité

Mais tout pouvoir législatif n’est pas grand-chose sans moyens d’investigation, d’enquête, de travail… On s’en rend bien compte quand on compare le Parlement de notre Ve République moribonde et le Congrès américain. Les conseils municipaux nouveaux devront donc élire, comme à New York, un président, un chef de la majorité, un chef de l’opposition.

Les conseils municipaux nouveaux, devront donc élire, comme à New York, un président, un chef de la majorité, un chef de l’opposition.

Les élus de la majorité comme de l’opposition (qui pourraient par ailleurs être plus nombreuse qu’aujourd’hui) disposeront des collaborateurs nécessaires, des pouvoirs et des moyens d’enquête, l’accès à des capacités d’expertise (budgétaires, d’urbanisme…), ils pourront aussi avoir recours à une administration, comme peuvent le faire aujourd’hui les députés et sénateurs français.

Une révolution à venir

Ce nouveau dispositif représente évidemment une vraie révolution pour les élus locaux. Gageons qu’il se heurterait aux réticences de ceux qui ne voudront pas de remise en cause de leurs pouvoirs. Il faudra passer outre. D’autres jugeront ce projet trop cher, il faudra expliquer que la démocratie a toujours un coût.

Mais après trois décennies de décentralisation qui n’a parlé que de compétences, territoires, impôts… il serait temps de s’intéresser à la démocratie locale !

Source : http://www.lettreducadre.fr/12242/pour-une-vraie-separation-des-pouvoirs-dans-les-collectivites/?utm_source=newsletter-ldc&utm_medium=email&utm_campaign=newsletter-19-10-2015

Nicolas Braemer, Rédacteur en chef, la Lettre du Cadre Territorial
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